Dans les hautes prairies avant Ator Grida
Entre Asta Ourda et Tor grida, rien ne vint gêner la progression de nos aventuriers. C’est toute la journée, la nuit et la demi-journée suivant qu’ils galopèrent bruyamment sur les sentiers rocailleux. Les marchands les observaient, étonnés qu’un si grand nombre de messagers fussent dépêchés vers le sud. Tout le monde savait que le Roi Sultan était à Telakara pour saluer la sorcière régente et honorer un groupe de héros. Quel pouvait être la raison de cette course ?
Harassant leurs chevaux jusqu’à qu’ils ne puissent plus avancer, ils s’écartèrent du chemin, trop passant, et se reposèrent à l’ombre d’une grande pierre plate. Un petit ruisseau semblait sourdre sous la mousse, entre les rochers. Les chevaux, comme les corbeaux se désaltérèrent, puisles aventuriers prirent leur tour de garde.
Tor grida
Tâh qui n’avait pas si sommeil, s’écarta du groupe pour aller chercher de quoi manger. Il avait pu lire quelques ouvrages sur les plantes dorriennes, et trouva assez facilement de très bonnes racines et quelques baies comestibles à l’orée d’un bois. L’air qui montait de la mer était agréable, et le silence de ces collines était apaisant. Il ne se laissa cependant pas aller à la contemplation, et entendit d’étranges bruits dans son dos. Se retournant discrètement, il vit deux silhouettes armées de courts arcs se dessiner en haut de la colline : des gnolls.
Ces hommes, bêtes à tête de chacal, vivaient en clan et chassaient en groupe. Il décida aussitôt de retourner vers le camp. Les gnolls décochèrent leurs flèches. Trois autres silhouettes apparurent et chargèrent dans la direction de Tâh, armées d’épée courtes et d’épées larges. Tâh accéléra la cadence et se mis à crier pour alerter ses compagnons. Tout le monde dormait hormis Zim qui se justifiait intérieurement de son action justicière de la veille. Il se leva sur ses courtes jambes et prix sa hache à deux mains. Il plissa les yeux et vît Tâh dévaler la pente à toute allure, poursuivit par cinq créatures. Avant de partir au combat, il demanda l’autorisation d’aller fracasser des crânes de chacal. Sans autres préliminaires il chargea les gnolls et écrasa sa hache sur les trois créatures avant même qu’elles ne comprirent ce qu’il leur arrivait. La première continua sa course sur une jambe avant de s’écrouler. La seconde vît son torse la dépasser et la troisième fut tranché dans la hauteur. EN moins de vingt secondes, il ne restait que les deux archers en retrait. Voyant ce spectacle horrible, la colère monta, et ils crièrent. On entendait encore leurs cris après qu’ils eurent détalé dans l’autre sens, la peur l’emportant largement sur leur honneur et leur rage.
Cependant, il ne fallait plus trainer. Les gnolls sont pleutres, mais ils peuvent être nombreux. Et les deux archers avaient bien remarqué le matériel et les chevaux présents.
Ils se remirent donc en route sur des chevaux à peine reposés et atteignirent la ville de Torgrida tard dans la soirée. Tor grida était une cité militaire. Elle se situait entre deux hautes collines, dans la brèche séparant les deux immenses forêts elfiques du Asta It’Zé et du Asta Doreïn Dor.
La ville était le seul passage autorisé par les elfes pour aller vers la cité indépendante de Telakara et les aventuriers devraient ainsi en passer par elle. C’était une cité immense réunissant trois des quatre écoles de guerre du Royaume, et près de cent mille âmes. Même si la forteresse admirait la nation du Rexcan pour ses réussites militaires et ses différentes troupes très spéciales, les corbeaux préférèrent tout de même rester dans ses faubourgs suffisamment peuplés et animés de rondes de gardes. Cependant, rien ne semblait annoncer qu’ils étaient recherchés par les autorités. La chance était-elle de leur côté ? Ils décidèrent de changer leurs chevaux pour des montures plus fraiches et se résignèrent à galoper encore en direction du sud. À la croisée des chemins à l’est de la cité, entre la route vers le sud et celle vers la capitale, ils laissèrent une fausse piste sur quelques lieux et rebroussèrent chemin par la rocaille, encapuchonnés discrètement.
Ce soir-là, ils prirent le temps de se reposer. Ils visitèrent la grande bâtisse qui accueillait les voyageurs. Un lieu où coulait la bière à flot, et où les chambres étaient verrouillées à double tour. L’auberge servait plus de trois cents personnes ce soir-là. Un soir comme tous les autres, assurément. Zim ne put se joindre à aucune troupe de joyeux lurons. Puni, et recherché, il resta avec Juddilth près de sa tente, et attendit que ses compagnons lui apportent la douce et trop courte pinte qui l’emporterait dans les bras de Morphée. Tâh et Fdack en profitèrent pour glaner des informations sur les rumeurs, les histoires et les on-dit arrivant du sud. Une nouvelle fois, ils n’entendirent rien qui les inquiéta.
La route qui menait à Ator Grida était extrêmement passante, peuplés de garde, de chiens d’Atlar et de marchands en tout genre. Les messagers galopaient dans un sens comme dans l’autre. Il y avait même des aventuriers qui cherchaient à faire fortune. De grandes quantités de bois arrivaient d’Atorgrida, des charrettes de cachaise étaient rangées le long du mur de l’immense auberge qui trônait en haut du promontoire légèrement en retrait de la croisée. L’endroit n’avait pas de nom, mais il grouillait de roublards, de marchands, d’opportunistes et de mercenaires. Les tentes se montaient à perte de vue quand venait le soir. Et au petit jour il n’en restait plus rien.
Nos chers aventuriers reprirent la route très tôt en prenant soin d’acheter un chariot, pour y ranger leur nouvelle tente et soulager le fessier blessé de tâh.
Le voyage s’annonçait sous de bons auspices, même si la chaleur commençait à se faire sentir.